Définition du sans-abrisme et de l'absence de chez-soi

Établir une définition du sans-abrisme et du mal-logement n’est pas tâche évidente tant les profils et parcours de vie de ces personnes sont multiples. Ce constat est renforcé par le fait que la définition du sans-abrisme et de l’absence de chez-soi peut varier en fonction du contexte social et culturel, du groupe concerné et des objectifs visés. On définit souvent le sans-abrisme et le mal-logement au regard de ce qui manque (le toit, les liens sociaux, l’adresse, l’accès effectif aux droits, etc.).
Un point fait toutefois l’unanimité : le sans-abrisme et l’absence de chez-soi ne se limitent pas à l’absence de toit. Cela était déjà souligné dans le Rapport général sur la pauvreté de 1994.
Définition
Une première définition du sans-abrisme dans un texte réglementaire belge se trouve dans l’Arrêté royal du 21 septembre 2004 visant l’octroi d’une prime d’installation par le CPAS à certaines personnes qui perdent leur qualité de personne sans abri, qui indique que le terme désigne “toute personne qui ne dispose pas de son logement, qui n’est pas en mesure de l’obtenir par ses propres moyens et qui n’a dès lors pas de lieu de résidence, ou qui réside temporairement dans une maison d’accueil en attendant qu’un logement soit mis à sa disposition” (article 1er).
La définition utilisée dans l’Accord de coopération concernant le sans-abrisme et l’absence de chez-soi (article 3), est celle de l’Arrêté royal de 21 septembre 2004 mentionné ci-dessus.
Cependant, cette définition gagnerait à être étoffée car elle ne prend pas en compte un certain nombre de profils tels que les personnes qui sont hébergées provisoirement par un particulier.
Comme indiqué précédemment, la définition du sans-abrisme et de l’absence de chez-soi est principalement abordée sous l’angle de l’absence de logement. Ce dernier permet à la fois d’assurer la stabilité et la sécurité d’un individu ; en d’autres termes, l’absence de logement porte atteinte à la dignité des individus. Plus qu’un bien marchand, il s’agit d’un droit, qui fait partie des droits économiques, sociaux et culturels. Le droit au logement est protégé par de nombreux instruments juridiques, aussi bien nationaux qu’internationaux. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un droit justiciable, il impose des obligations positives aux autorités publiques, ces dernières doivent dès lors mettre en place des mesures afin de rendre ce droit le plus effectif possible. Ainsi, le droit au logement entraine des obligations de moyen et non de résultat dans le chef de l’Etat : il n’est pas possible de réclamer son droit à un logement décent en justice. Toutefois, “la vie dans la rue engendre très souvent des situations qui constituent une violation de droits opposables à l’Etat : le droit à une vie familiale et privée, le droit à l’éducation, le droit à la dignité, l’interdiction des traitements inhumains et dégradants, l’assistance aux personnes en danger, …” (Ligue des droits humains (2014), Comment faire respecter le droit au logement à Bruxelles ? – Avis aux bourgmestres).
Ainsi, selon le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, “le sans-abrisme porte profondément atteinte à la dignité et au droit à la vie et compromet l’inclusion sociale. Il constitue a priori une violation du droit au logement et enfreint plusieurs autres droits de l’homme en plus du droit à la vie, parmi lesquels les droits à la non-discrimination, à la santé, à l’eau et à l’assainissement et à la sûreté de la personne, ainsi que le droit de ne pas subir de traitement cruel, inhumain ou dégradant” (Conseil des droits de l’homme (2019), Lignes directrices relatives à la réalisation du droit à un logement convenable, A/HRC/43/43, p. 8).
Typologies Ethos et Ethos Light
En l’absence de définition claire du sans-abrisme et de l‘absence de chez-soi faisant consensus au niveau européen, la Fédération Européenne d’Associations Nationales Travaillant avec les Sans-Abri (FEANTSA) a créé une typologie de l’exclusion du logement appelée ETHOS (European Typology on Homelessness and housing exclusion). Cette typologie développée en 2005 propose une définition conceptuelle de l’exclusion liée au logement, sans prise en compte du statut social. Le sans-abrisme et l’absence de chez-soi y sont approchés comme processus et non comme état de fait. Ainsi elle intègre aussi bien des profils en situation de sans-abrisme et d’absence de chez-soi, que des profils qui risquent de tomber dans le sans-abrisme et l’absence de chez-soi (Conférence européenne de consensus sur le sans-abrisme (2010), Recommandations politiques du Jury).
La typologie ETHOS se fonde sur 13 catégories opérationnelles basées sur 4 grandes catégories conceptuelles :
- Sans-abrisme : concerne les personnes dormant à la rue
- Sans-logement : concerne les personnes qui ont un abri mais provisoire, dans des institutions ou foyers d'hébergement
- Logement précaire : concerne les personnes menacées d'exclusion sévère en raison de baux précaires, expulsions, violences domestiques
- Logement inadéquat : concerne les personnes vivant dans des caravanes sur des sites illégaux, dans des conditions de surpeuplement sévère
Typologie Ethos

Source : Fédération européenne d’associations nationales travaillant avec les sans-abri – ETHOS 2007: Typologie européenne de l’exclusion liée au logement
L’utilisation de la typologie ETHOS Light est recommandée par de nombreux acteurs européens, comme c’est notamment le cas dans le cadre de la Conférence européenne de consensus sur le sans-abrisme.
Ethos Light est une version simplifiée de la typologie ETHOS originale car elle ne compte que 7 catégories opérationnelles :
- Personnes vivant dans l’espace public
- Personnes en hébergement d’urgence
- Personnes en foyer d’hébergement
- Personnes en/sortant d’institution
- Personnes en logement non conventionnel
- Personnes vivant provisoirement chez des ami-e-s ou de la famille
- Personnes menacées d’expulsion
L’analyse de ces différentes catégories illustre la complexité du sans-abrisme et du mal-logement et les nombreuses situations de vie qui s’y retrouvent. Par ailleurs, l’Accord de coopération concernant le sans-abrisme et l’absence de chez-soi de 2024, qui constitue le texte de référence en la matière, renvoie à cette typologie (art. 3). Ce nouvel Accord est en cours de validation et se fondera sur les objectifs de la Déclaration de Lisbonne, à savoir l’éradication du sans-abrisme et du mal-logement d’ici à 2030.
Ainsi, les différents dénombrements organisés en Belgique se fondent sur la typologie ETHOS et récoltent dès lors des informations selon les catégories suivantes :
Typologie Ethos-Light

Source : BRUSS’HELP – Dénombrement : méthodologie