Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale

L’emploi offre-t-il une protection suffisante contre la pauvreté ?

Bien qu’avoir un emploi constitue souvent une protection contre la pauvreté, ce n’est pas toujours le cas. Selon l’enquête EUSILC 2016 (revenus 2015), la Belgique compte 4,7 % de travailleurs pauvres dont 3,4 % de salariés pauvres et 15,2 % d’indépendants pauvres. Les chiffres relatifs aux indépendants doivent être interprétés avec prudence.


Commentaire :

Le risque de pauvreté est plus faible chez les personnes actives que chez les personnes sans emploi : 4,7 % contre 31,9 %.
En comparaison avec l’Union Européenne, la Belgique obtient d’assez bons résultats dans ce domaine (4,7 % en Belgique contre 9,6 % pour l’UE28 selon l’enquête EUSILC 2014) (tableau 6a).

Cependant, le chiffre de risque de pauvreté des travailleurs sous-évalue le travail non enregistré, dans lequel certaines personnes plus vulnérables se réfugient pour survivre. Il n’indique pas non plus le revenu disponible. Et il ne donne qu’une indication financière.

Ces dernières années, les chiffres de risque de pauvreté des travailleurs sont restés relativement stable (tableau 6b). Mais l’augmentation du nombre de salariés qui demandent un revenu d’intégration complémentaire ou une aide sociale au CPAS, indique bel et bien une évolution négative. D’autres services sociaux et associations qui luttent contre la pauvreté rapportent également une plus grande vulnérabilité et pauvreté des salariés.

Tableau 6a : Taux de risque de pauvreté (<60 % du revenu net médian) pour la population en âge de travailler (18-64 ans) selon le statut d’activité le plus fréquent*, la Belgique, des pays voisins et l’UE-28, SILC 2015-2016

Tous

Selon le statut d’activité le plus fréquent

Chômeurs

 Retraités

 Autres personnes inactives

Personnes non occupées (**)

Personnes occupées

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

Belgique 13,6 14,8 40,4 45,7 7,1 8,8 31,5 33,8 29,3 31,9 4,5 4,7
Allemagne 17,4 17,0 69,2 70,8 26,2 24,4 30,4 28,9 38,5 36,8 9,6 9,5
France 13,2 13,2 37,1 38,4 6,7 4,8 29,2 27,6 25,5 24,6 7,5 8,0
Pays-Bas 12,2 13,1 (b) 36,0 44,7 (b) 11,9 (p) 17,3 (b) 27,9 28,9 (b) 28,8 31,7 (b) 5,1 5,6 (b)
UE-28 17,1 17,1 47,5 48,6 12,2 12,7 30,3 30,1 32,1 32,3 9,5 9,6

* Le statut d’activité le plus fréquent est défini comme le statut que les gens déclarent avoir occupé pendant plus que la moitié des mois dans l’année civile précédente.
**
Personnes non occupées = les chômeurs, les retraités et les autres statuts sans emploi
(b) : rupture de série
source : Eurostat : EU-SILC

Tableau 6b: Évolution du taux de risque de pauvreté selon le statut d’activité, personnes âgées de 18 à 64 ans, Belgique, SILC 2010-2016

SILC 2010
(revenus 2009)

SILC 2011
(revenus 2010)

SILC 2012
(revenus 2011)

SILC 2013
(revenus 2012)

SILC 2014
(revenus 2013)

SILC 2015
(revenus 2014)

SILC 2016
(revenus 2015)

Personnes occupées

4,4

4,1

4,5

4,4 (b)

4,8

4,5

4,7

Personnes non occupées**

24,4

27,5

28,4

29,8 (b)

30,6

29,3

31,9

(b) :  rupture de série
*
* sans emploi = les chômeurs, les pensionnés et les autres statuts sans emploi
source : Eurostat : EU-SILC

En 2015 (EU-SILC 2016), notre pays comptait 3,4 % de travailleurs salariés pauvres. Plusieurs facteurs accroissent le risque de vivre dans la pauvreté tout en ayant un emploi salarié. Premièrement, le phénomène des salariés pauvres est fortement lié à une incapacité à générer un revenu du travail suffisant au niveau du ménage. Les ménages a un seul salaire et les familles monoparentales courent un risque de pauvreté considérable. Deuxièmement, les caractéristiques individuelles jouent tout de même un rôle : les salariés plus jeunes et les personnes faiblement qualifiées enregistrent un score sensiblement supérieur. Troisièmement, les conditions de travail précaires jouent un rôle. Les chiffres relatifs à la pauvreté des personnes ayant un contrat de travail flexible ou de courte durée sont sensiblement plus élevés, comparés aux chiffres relatifs aux travailleurs sous contrat de travail plus ‘classique’. Enfin, des services sociaux de base (enseignement, logement, garde d’enfants, mobilité, soins de santé…) inabordables financièrement ou inaccessibles augmentent les risque de pauvreté des travailleurs salariés.

Le nombre d’indépendants pauvres s’élevait en 2015 (EUSILC 2016) à 15,2 %. Pour différentes raisons, les données concernant les revenus des indépendants dans l’enquête SILC doivent être interprétées avec prudence. Jauger les revenus nets de l’année précédant l’enquête n’est par exemple pas évident car au moment de l’enquête, les indépendants ne sont souvent pas encore en mesure de faire ce calcul. Une autre raison tient au fait que le petit nombre d’indépendants représentés dans le panel de EUSILC limite sa fiabilité. Le chiffre de 15,2 % laisse supposer que la pauvreté des indépendants est sensiblement plus élevée que celle des travailleurs salariés. La déprivation matérielle sévère montre au contraire une image différente: les pourcentages sont quasi équivalents (2,1 % pour les indépendants et 2,2 % pour les salariés selon EU-SILC 2016).

La problématique de la pauvreté des travailleurs est abordée dans le rapport bisannuel 2012-2013 du Service de lutte contre la pauvreté. (Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale (2013), Protection sociale et pauvreté, p. 31-38).

Tableau 6c : Évolution du taux de risque de pauvreté des travailleurs selon des caractéristiques de l’emploi, Belgique, SILC 2010-2016

SILC 2010
(revenus 2009)
SILC 2011
(revenus 2010)
SILC 2012
(revenus 20
11)
SILC 2013
(revenus 2012)
SILC 2014
(revenus 2013)
SILC 2015
(revenus 2014)
SILC 2016
(revenus 2015)
Tous 4,4 4,1 4,5 4,4 4,8 4,5 4,7
Statut
salarié 3,1 3,2 3,3 3,3 3,5 3,1 3,4

indépendant

15,7 12,7 15,2 13,9 15,4 15,8 15,2
Durée de travail
temps plein 3,9 3,1 3,4 3,5 3,9 3,7 3,7
temps partiel 5,8 6,4 6,4 5,9 6,2 6,4 6,4
Mois travavaillés
1 an 4,0 3,8 4,2 4,1 4,2 4,2 8,5
moins de 1 an 11,2 7,9 8,0 9,5 13,7 10,3 4,5
Travailleurs salariés uniquement
Type de contrat
salariés avec un emploi permanent 2,4 2,5 2,7 2,7 2,5 2,6 2,5
salariés avec un emploi temporaire 12,2 10,1 11,1 10,0 14,9 10,4 14,1

source : Eurostat : EU-SILC

Tableau 6d : Évolution du taux de risque de pauvreté des travailleurs selon des caractéristiques des personnes et des ménages,  Belgique, SILC 2010-2016

SILC 2010
(revenus 2009)
SILC 2011
(revenus 2010)
SILC 2012
(revenus 20
11)
SILC 2013
(revenus 2012)
SILC 2014
(revenus 2013)
SILC 2015
(revenus 2014)
SILC 2016
(revenus 2015)

Tous

4,4 4,1 4,5 4,4 4,8 4,5 4,7

Sexe

homme

4,8 4,3 4,5 4,5 4,5 4,3 4,8

femme

4,1 4,0 4,4 4,2 5,1 4,7 4,6
Âge
<25 4,5 6,6 3,5 2,7 6,9 6,6 4,6
25-<55 4,5 4,1 4,5 4,5 5,0 4,3 4,9
55+ 4,2 3,6 4,7 4,4 2,6 5,0 3,5

Niveau d’éducation*

faible 8,5 8,6 10,1 10,1 9,6 9,2 9,9
moyen 5,0 4,8 4,2 4,7 6,1 5,8 6,1
élevé 2,4 2,1 2,9 2,5 2,5 2,6 2,3
Type de ménage
ménage d’une personne 4,1 6,4 4,9 6,6 5,4 6,6 6,9
ménage monoparental avec enfants dépendants 12,5 12,1 14,7 13,6 20,4 14,0 14,0
2 adultes ou plus sans enfants dépendants 3,2 2,9 2,9 2,6 2,8 2,3 2,4
2 adultes ou plus avec enfants dépendants 4,9 3,7 4,7 4,3 4,8 4,7 5,2
tous les ménages sans enfants dépendants 3,5 4,0 3,6 3,8 3,6 3,6 3,6
tous les ménages avec enfants dépendants 5,4 4,4 5,4 5,0 6,0 5,4 5,7

*faible=Isced11 0-2; moyen=Isced11 3-4; élevé=Isced11 5-8
source : Eurostat : EU-SILC